À propos des armes atomiques dans l’espace

9 juillet 1962 aux États-Unis, la Commission de l’énergie atomique procède à un essai d’explosion atomique dans l’espace. “Starfish Prime” (cf. photo) consiste à déclencher une bombe thermonucléaire de 1,4 mégatonne à 400 kilomètres d’altitude. 1/3 des satellites en orbite sont démolis. Cette année-là, trois tests ont lieu de chaque côté du rideau de fer

En 1963 le “Limited Test Ban Treaty” est signé par les USA, l’URSS et le UK. Les explosions sous la mer, dans l’atmosphère et dans l’espace extra-atmosphérique sont interdites. En octobre, les deux superpuissances s’accordent pour ne pas autoriser le stationnement d’armes de destruction massives en orbite, ce que le Traité de l’espace vient confirmer en 1967

On parle parfois d’”apprentissage environnemental” pour décrire ces arrangements, “pragmatiques” (c’est un peu cynique), qui permettent de préserver un milieu utile à tous, y compris pour la guerre. Une telle bombe explosant en orbite aujourd’hui occasionnerait des radiations et des montagnes de débris, ce qui n’est bon pour personne

De quoi éclairer (en partie) la séquence en cours – la Russie développerait une “arme secrète” permettant de faire exploser des bombes atomiques dans l’espace. “Information” que le Kremlin balaie, et dont on peut légitimement se demander de quoi elle retourne

S’il s’agit de détruire un satellite en orbite, la Russie s’y est déjà employée avec un missile ASAT en 2021. S’il s’agit de pourrir une orbite étant donné le caractère non discriminant d’une telle arme, alors ses propres moyens et ceux de ses alliés seront également affectés. S’il s’agit de viser une cible sur Terre, les ICBM font déjà très bien le job

Le président de la commission du renseignement au Congrès américain, le Républicain Mike Turner, demande de “déclassifier tous les documents qui existent à ce propos”, et ses collègues d’embrayer : il n’y a pas de raison de paniquer…

Avec le risque évident que présente l’analyse à chaud, il fait bon rappeler que l’espace (mais pas seulement) est aussi un bon terrain pour la paranoïa, la mise en évidence de “gaps” (bomber gap, missile gap, psi gap) plus ou moins fantasmés, jusqu’à la peur d’un « Pearl harbor spatial » qui revient fréquemment aux USA. Paranoïa toujours utiles pour semer le trouble et justifier la surenchère militaire

On retiendra au passage que les USA (et la Chine) sont, eux, bien pourvus de petites navettes faussement secrètes et parfaitement opérationnelles (X-37B et CSSHQ). La première, selon le bras armé de Poutine Yan Novikov, pourrait être dotée de 6 têtes nucléaires

En tout état de cause, on préférerait moins d’accusation à l’emporte pièce, (l’histoire montre qu’il ne fait jamais bon affirmer que l’autre se dote d’armes nucléaires sans en être parfaitement sûr), et – voeu pieu – plus de diplomatie dans ce domaine

Mais on ne peut s’empêcher de noter la rémanence de ces phénomènes au cours d’une histoire qui rime, comme on le rappelle dans notre bouquin avec Arnaud Saint-Martin

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