Sommes-nous des hommes machines ?
La question était posée ce 16 février au collège des Bernardins, au détour de l’avant-première d’un documentaire coproduit par la chaîne Arte et portant sur la vie de l’auteur de science-fiction Philip K. Dick. Ce dernier aurait sans doute complété le thème de la soirée de ses interrogations favorites en demandant à son tour : qu’est ce que la réalité ? Et qu’est ce que l’humain ? Vivons nous dans un monde parallèle ?
Pour répondre à ces questionnements existentiels, Yann Coquart, réalisateur, et Ariel Kyrou, spécialiste des nouvelles technologies, ont écrit et monté « Les mondes de Philip K. Dick », le film-documentaire qui retrace la vie du prolifique auteur qu’on ne présente plus (nombre de ses ouvrages ont donné lieu à des films devenus des classiques tels que Blade Runner, Minority Report, Total Recall ou encore la récente série produite par Amazon : Le maître du haut château). Suite à la projection, les invités du collège ont abordé les grands thèmes chers à l’auteur.
C’est avec le blogueur culturel Saint Epondyle que je me suis rendu à cette soirée science-fictionnelle soigneusement saupoudrée de prospective numérique (comme quoi, il n’y a pas que les blogueuses mode qui font des trucs ensemble). Saint Epondyle a déjà couvert plusieurs sujets relatifs à Philip K. Dick, vous pouvez les retrouver ici, il est également l’auteur d’un recueil augmenté de ses billets, idéal pour envisager la science-fiction de façon originale.
Ainsi, au cours de sa vie, Phil Dick aura écrit 40 romans et plus de 100 nouvelles. L’auteur évolue dans l’après guerre et oscillera tout au long de sa carrière d’écrivain entre une peur-panique d’un retour de la bête nazie et une critique virulente de la politique extérieure américaine. Autant dire qu’il n’aura pas fait l’unanimité auprès du président Nixon, ni des agences de renseignement alors obsédées par leurs tentaculaires chasses aux sorcières… Par ailleurs, Les quelques déconvenues politiques de Phil Dick et son penchant pour les amphétamines auront peut-être poussé son œuvre à devenir ce qu’elle est aujourd’hui : une source d’inspiration infiniment précieuse pour penser notre environnement technologique.
La bande-annonce du documentaire qui sera diffusé le mercredi 2 mars à 22h35 sur Arte
Suite à la projection, c’est un véritable ping-pong intellectuel qui s’est joué autour de la grande table des grandes questions numériques du collège des Bernardins; le numérique a-t-il changé l’homme ? comment science-fiction et innovation se nourrissent-elles l’une de l’autre ? pourquoi ce retour en force des machines dans l’imaginaire populaire ? Quatre interlocuteurs aguerris à ces questions ont échangé autour de ces sujets. Présentation :
- Milad Doueihi, co-titulaire de la Chaire des Bernardins « l’homme au défi du numérique »
- Catherine Dufour, auteur de science-fiction
- Ariel Kyrou, co-scénariste du documentaire Les Mondes de Philip K. Dick
- Pascal Picq, paléoanthropologue au Collège de France
Quatre chercheurs et écrivains, disais-je, qui ont pu s’adonner à une mise en mot des sujets numériques contemporains. En effet, nous assistons à un grand retour des thèmes chers à Philip K. Dick, lesquels frisent – soyons honnêtes – les pires contre-utopies impliquant des robots… Même si pour Catherine Dufour, ces fantasmes n’ont jamais vraiment quitté les chaumières, il faut reconnaître que ça n’est pas un hasard si Arte déploie en 2016 un cycle sur Phil Dick (surtout quand l’année passée, la chaîne programmait la série « Real humans » qui décrit les désagréments juridiques de robots humanoïdes intelligents…).
En science-fiction, tout n’est pas qu’affaire de robots ni de Frankenstein
La tablée conviendra sans mal que la science-fiction est le propre de l’homme moderne : elle va « chercher ce qu’il se passe dans les laboratoires pour le projeter dans le champ social, elle permet de réfléchir à l’avance à quelle sauce on va être mangé » poursuit Catherine Dufour. Cependant, Il ne faudrait pas verser dans les fantasmes Orwelliens avec trop de vigueur, à cet égard, Milad Doueihi rappelle que si le mythe de Golem (la créature échappant à son maître) domine aujourd’hui dans le domaine de la science-fiction, cette dernière est également l’occasion de réfléchir à notre rapport au réel, au virtuel et à la pluralité des mondes, surtout chez Philip K. DicK.
Et Philip K. Dick à lui seul, réactive bien plus que quelques machines mal intentionnées. « L’auteur réactualise les grands mythes », nous précise Ariel Kyrou, il joue avec nos fascinations et nos répulsions, il s’interroge sur sa vie, ses rêves, et réveille en nous un désir de spiritualité.
Faut-il être un homme torturé pour produire un monde angoissant ?
Philip K. Dick aura passé sa vie entière retranché dans son appartement, hors du monde. C’est là qu’il a pu, en creux, réfléchir à sa réalité profonde, ouvrir toutes les portes de l’imaginaire et faire sauter la digue des possibles. L’auteur aura vécu moults traumatismes, de la perte d’une soeur jumelle qu’il n’aura jamais connue et cherchera sa vie entière à la confrontation avec le passé d’un père ancien soldat d’une des guerres les plus épouvantables du XXème siècle… Philip K. Dick est aussi une victime de ces hasards de la vie et tributaire d’événements tragiques qui l’auront fait lui, et pas un autre.
A ce titre, on peut se demander si les angoisses de Philip K. Dick ne sont pas salutaires pour nous tous, à l’heure où des programmes de police anticipent le crime via des programmes informatiques tels que Predpol (comme l’auteur l’avait prévu avec les « précognitifs » dans sa nouvelle Minority Report publiée en 1956).
Mais alors, l’impossible de Philip K. Dick deviendrait-il notre réalité ? Un monde gouverné par les algorithmes, où la technologie permettrait tout, du voyage interstellaire à la communication mondiale, en passant par l’intelligence artificielle ? Cette vision idyllique, cette soif de liberté relayée par les grandes firmes technologiques tient-elle de l’illusion, de la foi ? C’est bien la question qu’il faut poser alors que chacun devient malgré lui un lobbyiste converti à des grands projets technologiques trop souvent portés par une logique financière ou un besoin d’asservir. Et pour cela, le prisme discret de Philip K. Dick ne doit jamais nous échapper.
Rappelons nous que bien souvent, les humains sont pires que les robots.
Bonsoir vous qui vous demandez où nous mène la surcouche des services que ma grand-mère orthographiait ‘le ouèbe’ avant de découvrir votre site.
Je me permets juste d’attirer votre attention sur 2 coquilles qui ont échappé à votre vigilance.
__ »L’auteur évolue dans ** un** l’après guerre et oscillera tout au long de sa carrière »
et puis dans la phrase suivante
__ »Autant dire qu’il n’aura pas fait **pas** l’unanimité auprès du président Nixon » ; un pas de trop ^^
__ »Rappelons nous que bien souvent, les humains sont pires que les robots. » Ici aucune faute, au contraire, que de justesse pour finir.
Bonne soirée
Bonsoir Da Vid, j’espère que mère-grand est devenue une fan car je désespère de n’intéresser que les jeunes loups de la génération Y… J’ai corrigé les petites coquilles, n’ayant pas les fonds pour assurer un revenu fixe à mon relecteur, celui-ci se désynchronise parfois, le ouèbe fait le reste. Ravi de sonner juste, même si ce billet n’est qu’une retranscription. N’hésitez pas à sonner une deuxième, troisième fois, la porte est ouverte.
Les Humains pire que des robots… c’est ce que je me suis parfois laissé penser face à certains fonctionnaires assez peu concernés par le fait d’accomplir leur mission de service public… ou d’autres, tellement dépourvus de recul sur le règlement que le plus binaire des algorithmes les surpasserait allègrement. Ou encore d’autres humains, carrément sadiques et imbus de leur petit pouvoir.
Est-il possible que certains Humains soient humainement inférieurs aux robots qui les remplaceront ?
[…] Sommes-nous des hommes machines ? Une plongée dans les univers de Philip K. Dick. La question était posée ce 16 février au collège des Bernardins, au détour de l’avant-première d’un documentaire coproduit par la chaîne Arte et portant sur la vie de l’auteur de science-fiction Philip K. Dick. Ce dernier aurait sans doute complété le thème de la soirée de ses interrogations favorites en demandant à son tour : qu’est ce que la réalité ? Et qu’est ce que l’humain ? Vivons nous dans un monde parallèle ? Pour répondre à ces questionnements existentiels, Yann Coquart, réalisateur, et Ariel Kyrou, spécialiste des nouvelles technologies, ont écrit et monté « Les mondes de Philip K. Dick », le film-documentaire qui retrace la vie du prolifique auteur qu’on ne présente plus (nombre de ses ouvrages ont donné lieu à des films devenus des classiques tels que Blade Runner, Minority Report, Total Recall ou encore la récente série produite par Amazon : Le maître du haut château). Suite à la projection, les invités du collège ont abordé les grands thèmes chers à l’auteur. (@MaisOuVaLeWeb). […]
[…] en os, Yaël aux commandes de l’organisation, et Irénée en rapporteur de l’événement pour Mais où va le web ?. Après tout, c’est bien en traînant près du buffet, entre la projection d’un documentaire […]
[…] ne pose pas la question différemment. 1968, c’est la date de la première édition de son livre Les Androïdes rêvent-ils de moutons électriques ? Dix ans avant la fabrication des premiers ordinateurs de maison et un peu moins de quarante ans […]
[…] de la non moins célèbre nouvelle de Philip K. Dick dans laquelle les « precogs », sortes d’hommes machines rêvent à l’avance des crimes que des individus commettrons – ou pas – permettant […]
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