Mon collègue est un robot : dans le cimetière de nos emplois

Rencontre fortuite avec un bouquin didactique sur l’histoire de nos meilleurs ennemis les robots. Mon collègue est un robot, de Valéry Bonneau, est un catalogue d’une quarantaine de robots et automates qui du canard de Jacques Vaucanson au petit prodige français Nao, ponctuent notre quotidien de leurs éternelles questions existentielles.

Valéry Bonneau est un passionné de robots. Littéralement habité par les nouvelles technologies et passionné par leurs potentiels effets, il déclare avoir voulu écrire « un livre à hauteur d ‘homme » pour se « projeter de manière sincère mais entière dans un possible monde d’après ». Ces quelques cent-cinquante pages en attestent; le ton est amical, sympathique, sans prétention mais étonnamment exhaustif. Le fruit d’une veille rigoureuse et rendue simple sur l’état de l’art en matière de robotique.

Le  célèbre Canard « digérateur » de Jacques Vaucanson

A ceux qui doutent encore de l’ampleur du phénomène, Valéry Bonneau rappelle que différentes études (MIT, Oxford) annoncent déjà que jusqu’à 50% de nos emplois pourraient être préemptés par des robots dans les décennies à venir. Mon collègue est un robot, c’est l’étalage concret de toutes ces machines qu’on prépare déjà à des travaux hautement spécialisés. Fermiers, soldat, manutentionnaires, garagistes, commerçants, Barmans, chefs, grooms, goûteurs de vins, techniciens de surface, chauffeurs (voire voiture, tout simplement), aides soignant, chirurgiens, prostituées… Finalement, il en deviendrait presque plus aisé de recenser les jobs qui ne seront pas affectés par la robotique. Pour nous faire avaler la pilule, il n’en n’oublie pas de citer les quelques gadgets qui nous habituent, doucement mais sûrement, à l’inexorable présence d’humanoïdes dans notre quotidien, exemple avec Robi, le robot qui éduque aux robots :

Une double page (exclusive) de Mon collègue est un robot 

Naturellement, la grande majorité des individus listés dans l’ouvrage sont bien moins coquins que Robi. Atlas par exemple (Boston Dynamics) 1m87 et 150 kilos est destiné au métier de vigile, ou de sauveteur, c’est selon. La firme déclare vouloir le rendre assez autonome pour conduire une voiture, ce qui est tout de même assez curieux quand on sait que les voitures autonomes sont elles-mêmes des robots opérationnels (à quoi bon ?). La robotique fourmille de paradoxes rigolos.

Atlas le Robot, pour aller plus loin, rendez-vous ici

Les grands adorateurs de la robotique découvriront ou redécouvriront l’étrange Aiko Chihira, gynoïde (androïde au féminin), hôtesse d’accueil made in Japan au faciès inquiétant de céramique. En robotique, on nomme « vallée de l’étrange » les imperfections d’un androïd quand il se met à ressembler à un être humain. Ce fameux « presque » humain mais pas tout à fait tend à en faire des monstres à nos yeux. Pourtant, Aiko Chihira reste une prouesse technique : « Elles possède 43 actionneurs qui lui permettent de bouger son visage (les yeux, la bouche, les sourcils), mais aussi ses brase et ses doigts. Du coup, elle parle aussi le langage des signes. Et ça tombe bien parce qu’elle a été conçue pour ça, traduire les langues en langage des signes. » 

Aiko Chihira est devenue une figure classique de la vallée de l’étrange

Quand à savoir ce qu’on fera une fois tous remplacés, Valéry Bonneau planche déjà sur de nouveaux projets pour y répondre. Si l’option du revenu universel lui semble incontournable, l’auteur reste prudent : « Que ferons, que serons-nous lorsque des machines, des objets connectés feront tout à notre place ? La tentation est forte de se rêver meilleur que l’on ne sera. George Orwell fait remarquer que si un bus contourne la forêt et permet de gagner trois heures de marche pour aller travailler, tout le monde prendra le bus. Les gens ne feront pas la queue aux escaliers mais aux Escalators. » Reste à savoir ce qu’il restera de nous quand les Escalators seront autant de robots à tout faire. Pour le prochain volume de la série, Valéry Bonneau souhaite aborder ces questions en suivant une famille type dans sa vie quotidienne. Du lit connecté qui vous dénonce en cas d’adultère à la plante de salon qui se déplace toute seule pour chercher de la lumière, « il est bien possible que nous ne fassions plus rien demain » si les robots continuent à creuser les tombes de nos emplois.

Quoiqu’il en soit, Mon collègue est un robot est un livre détendu, précis et agréable, à mettre en toutes les mains, à commencer (à mon humble avis) par celles des plus jeunes. De quoi se faire une culture – sans fantasme ni a priori – autour de ce que sont, font et feront les robots. Si nous les laissons faire.

Dans le même genre, une jolie bande-dessinée sur l’intelligence artificielle. C’est par là.

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7 années il y a

[…] désenchantement d’internet ne va pas pour autant vous déprimer. Mon collègue est un robot : dans le cimetière de nos emplois. Valéry Bonneau est un passionné de robots. Littéralement habité par les nouvelles technologies […]